« Depuis l’élection de Hollande, la France s’est réformée comme jamais »

Franois Hollande a prfac le livre Le Moteur du changement: la dmocratie sociale qui fait l’loge de sa mthode. Interview de l’un des auteurs, Jacky Bontems.

Dans leur livre Le Moteur du changement: la démocratie sociale, Jacky Bontems* et Aude de Castet, en collaboration avec Michel Noblecourt, (ed. Lignes de repères-Fondation Jean Jaurès), retracent l’histoire du dialogue social en France et font l’éloge de François Hollande, ce président qui affirme que la négociation entre partenaires sociaux est la seule (bonne) manière de réformer.

Pourquoi le président de la République a-t-il accepté de préfacer votre livre ?

Parce qu’il comble un manque, en mettant à jour l’originalité d’une démarche qui a finalement été assez peu analysée, en détaillant les résultats obtenus depuis le début du quinquennat et la méthode qui les fonde. En trois ans, la France s’est réformée comme jamais. Tous les sujets ayant trait à l’emploi et au travail ont été revus, revisités, refondés en profondeur avec cette caractéristique socialiste, voulue par le président, d’allier progrès, justice et pragmatisme pour ne laisser personne au bord de la route.

Pourtant sa méthode est, sinon en échec, du moins en panne…

Ce n’est parce qu’il y a eu un échec [celui de la négociation sur le dialogue social dans l’entreprise] qu’il faut condamner la méthode. Dans la vie sociale comme dans la vie tout court, toute négociation peut ne pas aboutir, puisque chaque protagoniste part de points de vue différents. Il est possible que la négociation sur le dialogue social ait échoué car elle était trop ambitieuse. Mais l’Etat a repris la main et fait voter une loi sur le sujet. Il faut insister sur cette réalité: depuis le début du quinquennat, les résultats positifs l’emportent largement.

Jacky Bontems est l'un des auteurs du livre "Le moteur du changement : la démocratie sociale!"

Jacky Bontems est l’un des auteurs du livre « Le moteur du changement : la démocratie sociale! »

photo personnelle

Quels sont-ils ?

Plusieurs accords majeurs ont été signés entre les partenaires sociaux : modernisation de l’emploi, qualité de vie au travail, formation professionnelle, par exemple. Avec des avancées réelles pour les salariés: réglementation accrue du temps partiel, généralisation de la complémentaire santé, taxation des contrats de courte durée, présence de salariés dans les conseils d’administration des entreprises, etc.

L’Etat n’est-il pas trop présent dans la relation patronat-syndicats ?

Le dialogue social à la française n’est pas chimiquement pur comme en Allemagne: il inclut l’intervention de l’Etat, non plus jupitérien, mais comme « chef d’orchestre » des différents acteurs sociaux et économiques: c’est notre spécificité.

Mais n’est-ce pas lui qui dicte son agenda ?

C’est un risque: que les élites politiques et économiques nous demandent de faire ce qu’eux-mêmes ne parviennent pas à réaliser. L’Etat doit se garder de nous donner injonction sur injonction. D’autant qu’il a tendance à lancer de nouvelles initiatives sans évaluer le résultat des politiques déjà en oeuvre. On mesure le décalage entre le temps du politique et le temps du social. Les partenaires sociaux doivent suivre leur propre rythme.

Justement, ils ne sont pas en super-forme…

D’abord, il ne faut pas oublier que le contexte économique, très dégradé depuis le début de la crise, rend les accords beaucoup plus difficiles. Ensuite, pour négocier il faut être deux. Dans le livre, nous nous interrogeons sur les véritables intentions du patronat : il manifeste un certain désintérêt pour la négociation nationale, à se demander s’il n’attend pas 2017 et un changement de majorité pour faire passer ses revendications. Ajoutons que beaucoup de patrons sont désormais sensibles aux thèses du Front national.

Et les syndicats de salariés ?

La seule nouveauté de ces dix dernières années, c’est la fragilisation de la CGT. C’est vrai qu’elle handicape le syndicalisme.

La loi Macron n’est-elle pas une entorse à la méthode du président ?

On aurait pu souhaiter une concertation ou une négociation sur certains sujets, comme sur le plafonnement des indemnités prud’homales.

En quoi votre livre contribue-t-il à nourrir les réflexions du futur candidat Hollande?

Le livre explore les nouvelles formes d’emploi comme le portage salarial, l’auto-entrepreneuriat et les réponses à y apporter. Nous mettons l’accent sur la nouvelle étape à franchir dans la sécurisation des parcours professionnels avec le compte personnel d’activité (CPA), annoncé par le président et proposons une autre vision de l’entreprise. Voilà de quoi alimenter le programme du candidat, en supposant que François Hollande le soit. En tout cas, nous le souhaitons !

*Jacky Bontems, ex-numéro 2 de la CFDT, est président du groupe de réflexion Réseau 812 et chargé de mission à France stratégie; Aude de Castet est vice-présidente de Réseau 812 et directrice de la communication de l’Institut de l’entreprise; Michel Noblecourt est éditorialiste au Monde.