Le gouvernement envoie un député en mission sur une île déserte

Ce matin au Journal officiel, une nouvelle mission gouvernementale a été confiée à un parlementaire : le député Philippe Folliot (UDI, Tarn) est chargé par le gouvernement d’une mission sur la valorisation scientifique de l’île de Clipperton.

(source Wikimedia)

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Quelque part au fond du Pacifique, à 1200 km des côtes Mexicaines se niche un petit coin de France appelé île de Clipperton. Cet îlot de 1,7 km² est français depuis 1711.

L’îlot est inhabité mais il nous a été plusieurs fois disputé par le Mexique. Il a notamment été occupé par une garnison mexicaine au début du XXème siècle, qui en profité pour extraire tout le phosphate (qui dit oiseaux dit guano, qui dit guano dit phosphate). Une centaine de personnes vivait ainsi sur l’ilôt en 1914. Hélas pour ces occupants, à la suite de la révolution mexicaine le Mexique les a oublié sur l’ile. Quand un bateau de passage secourut les naufragés en juillet 1917, il ne restait que 3 femmes et 8 enfants. Tous les hommes avaient été tués par le scorbut, sauf le dernier assassiné.

Cet homme, Victoriano Álvarez, avait profité de sa position de dernier survivant masculin pour se proclamer roi,  instaurant une tyrannie contre les femmes survivantes en tuant et violant. Il fut tué à la veille du passage de l’USS Lexington, un bateau américain qui cherchait des allemands mais ne trouva que les survivantes. Celles-ci furent ramenées en Californie, jugées, acquittées et renvoyées au Mexique.

La souveraineté française fut officiellement reconnue en 1931, mais l’île fut occupée par les Américains à la fin de la seconde guerre mondiale (qui furent victime d’un débarquement raté sur une île déserte). Face aux protestations énergiques de la France et du ministre Georges Bidault, les Américains nous rétrocédèrent l’île en mars 1945.

(source Wikimedia)

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Depuis, on y a fait quelques visites : De Gaulle y a envoyé des missions dans les années 60 (dûment relatées par Gabriel Macé du Canard enchaîné), Cousteau est passé en 1980, Jean-Louis Etienne y a conduit une expédition en 2005. Il faut dire qu’il n’y a pas grand chose à faire à Clipperton. Le phosphate est épuisé, mais il y a une zone économique exclusive de 200 milles marins (on trouve du thon dans les eaux de Clipperton). La population de Clipperton est réduite : outre des rats (arrivés sur l’ile il y a une vingtaine d’années), on trouve surtout des crabes (environ 10 millions) et la plus grosse colonie de fou masqué du monde. Et un député UDI, donc.

Ce député était présent sur l’île au printemps dernier avec une mission de la marine nationale (voir son journal de bord). Il a l’air pleinement convaincu du potentiel de Clipperton et de la nécessité de l’exploiter. Il a même réussi à convaincre le gouvernement de lui confier une mission sur le sujet (mission bénévole, rappelons-le). On peut juste se demander si c’est bien le rôle d’une mission gouvernementale confiée à un parlementaire…