Statut des fonctionnaires: les avantages du septennat

La scurit de l’emploi semble une protection: elle est en fait une prison. Malgr la peur du chmage, tre vie enseignant, policier ou inspecteur des impts n’est pas une perspective rjouissante, mme s’il s’agit de mtiers vocation.

Emmanuel Macron est un personnage de théâtre, il est le petit Victor inventé par Roger Vitrac: le jour de ses 9 ans, cet enfant surdoué décide de jeter la vérité à la face de ses parents et de tous les adultes, afin de faire voler en éclats l’hypocrisie de la société bourgeoise par l’exposition crue du vice, du secret et de l’inavouable.

De même, le ministre de l’Economie bombarde de ses discours et de ses allusions le continent des non-dits socialistes. Qu’il parle à la tribune de l’Assemblée, devant le Medef ou dans des déjeuners « off the record« , c’est toujours à la gauche qu’il s’adresse, pour tenter de dynamiter ses archaïsmes. Sur le statut des fonctionnaires, comme sur les 35 heures ou le travail le dimanche, il enduit ses boulets réformistes de la poix du bon sens, afin que le débat, sans coup férir, s’enflamme. Il n’y a rien de neuf dans ses propos, il n’y a rien de contestable dans ses diagnostics, il n’y a rien de prévu dans son programme législatif, mais le seul exposé du réalisme suffit à débusquer les conservateurs, les idéologues et les dogmatiques. Victor Macron fait des ravages.

La sécurité de l’emploi, une prison

Sans réforme de l’Etat, il n’y aura pas de redressement de la France, et, sans modification du statut des fonctionnaires, il n’y aura pas de réforme de l’Etat. Au coeur de ce statut, la sécurité de l’emploi semble une protection: elle est en fait une prison. Malgré la peur du chômage, être à vie enseignant, policier ou inspecteur des impôts n’est pas une perspective réjouissante, même s’il s’agit de métiers à vocation. Il est donc nécessaire de mettre un terme à cette perpétuité, coûteuse pour le pays comme pour les individus.

Tout recrutement dans la fonction publique devrait prendre la forme d’un engagement septennal. Au bout de cinq ans, l’Etat employeur prend les devants s’il n’est pas satisfait de son agent, et lui signifie que le contrat ne sera pas reconduit. Alors, le salarié peut demander une formation afin de préparer sa reconversion et son arrivée sur le marché de l’emploi privé. Au moment de quitter l’administration, il est indemnisé. Mais l’employé peut lui aussi, au bout de cinq ans dans un poste, signaler à sa hiérarchie qu’il en a fait le tour, qu’il n’est pas satisfait de son travail ou simplement qu’il aspire à une évolution vers d’autres métiers.

Lui sont proposées alors des formations pour aller vers le privé ou tenter les autres concours de la fonction publique. Ainsi, un professeur peut s’orienter vers la justice, un fonctionnaire de l’Equipement glisser vers l’Agriculture ou un militaire devenir policier. Si ni l’administration ni le fonctionnaire ne disent rien, le contrat est reconduit pour une durée de sept ans, aux mêmes conditions. Il faut aussi, dans cette gestion des parcours, prévoir des systèmes d’urgence: la rupture de contrat peut être prononcée par l’Etat sans délai devant une accumulation de dysfonctionnements manifestes; une demande de mutation, ou de « libération », peut être formulée par l’employé en cas de souffrance au travail avérée.

Comment réformer la « territoriale »?

Pour les collectivités locales, la réforme doit être plus radicale. Parce qu’elles sont au plus près de la vie économique et des « bassins d’emploi », parce que les alternances politiques y sédimentent les embauches au lieu d’assumer de vastes remplacements partisans, mais aussi parce que le clientélisme et la corruption sont plus ravageurs encore dans la proximité, elles doivent approcher le droit commun en matière de postes, et s’apparenter à des entreprises de service public. Il est impossible de bouleverser ainsi la « territoriale » sans provoquer de terribles protestations: c’est pourquoi une telle privatisation ne pourra advenir que si l’élu principal recueille l’approbation de ses électeurs lors d’un référendum.

Le statut de la fonction publique impose à ses agents une « obligation de réserve » ainsi formulée: « Le principe de neutralité du service public interdit au fonctionnaire de faire de sa fonction l’instrument d’une propagande quelconque. » Heureusement, la liberté d’expression à la française prime sur cette contrainte, et il est bon que les fulgurances de Macron soient commentées dans les bureaux et derrière les guichets. De toute façon, Victor meurt à la fin de la pièce, puisqu’il a dit la vérité.