Migrants, travail… Après le Brexit, une Europe désunie sur ses dossiers chauds

Une semaine après le séisme du Brexit, l’incertitude demeure totale sur les conditions de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Les 27 pays membres, eux, doivent continuer à avancer. Et ils ont d’importants dossiers sur le feu.

Jour après jour, les Européens découvrent les conséquences politiques et économiques du Brexit. La livre sterling a chuté, les dirigeants des pays membres tentent de s’entendre sur les modalités d’application de l’article 50 et la course pour rejoindre le 10, Downing Street est lancée de l’autre côté de la Manche. Ce vendredi, pour ne rien arranger, l’agence de notation Standard & Poor’s a privé l’ensemble de l’Union européenne de son triple A. Autant d’événements qui viennent s’ajouter à la liste déjà bien longue des dossiers brûlants à la charge des institutions européennes, et qui divisent à bien des égards les chefs d’Etats européens.

Le casse-tête des migrants

800 000 migrants sont arrivés officiellement sur les terres européennes en 2015. L’Europe est aujourd’hui bousculée par son incapacité à gérer une crise migratoire sans précédent. La faute, sans doute, à des règles obsolètes, déconnectées de l’ampleur du phénomène. La faute, surtout, à un manque criant d’unité, entre les pays prêts à prendre leurs responsabilités en matière d’asile, et ceux qui préfèrent ériger des kilomètres de barbelés.

En théorie, les autorités sont censées relever les empreintes de toute personne arrivant sur le territoire. Il revient alors au premier pays d’arrivée de gérer la demande d’asile. Ce principe n’est aujourd’hui plus viable. La charge est trop lourde pour la Grèce et l’Italie. Un régime dérogatoire a donc été mis en oeuvre, pour répartir les migrants entre les différents pays européens. C’est dans ce cadre que la France s’est engagée à accueillir 33 000 personnes en deux ans.

Pour en finir avec ce colmatage, les pays membres négocient actuellement une réforme du règlement « Dublin III ». Selon une source européenne, il s’agit d’inscrire dans le marbre le principe de la relocalisation, en fixant un palier à partir duquel un pays serait considéré comme étant « en souffrance ». Ces relocalisations seraient ensuite fixées en fonction de critères, comme le PIB rapporté au nombre d’habitants.

Mais ces critères devront être définis avec la plus grande attention. A Bruxelles, un fin connaisseur du sujet se demande comment, dans les faits, on pourrait demander à un Érythréen de s’installer en Roumanie. « Il serait impossible pour lui de s’intégrer. Les barrières sont trop grandes, explique-t-il. Les différences culturelles varient énormément d’un pays à un autre. C’est aussi la raison pour laquelle certains pays sont très demandés ». Pour lui, l’Europe devra surtout retrouver une unité. « Historiquement, la France, l’Allemagne et les pays du Benelux partageaient la même idée de la politique migratoire, ce n’est plus le cas aujourd’hui ». Sans parler des initiatives de pays comme la Hongrie, qui va organiser un référendum pour savoir si ses citoyens acceptent ou non de jouer le jeu de la relocalisation.

Travailleurs détachés: 11 cartons jaunes

Les travailleurs détachés incarnent aux yeux des eurosceptiques toutes les dérives de l’UE. La législation permet à un ressortissant de l’UE de travailler dans un autre pays l’Union européenne. Son salaire relève alors de la législation du pays d’accueil. En revanche, sa couverture sociale est payée dans son pays d’origine. De fait, le dispositif permet aux pays de l’est de fournir une main d’oeuvre à faible coût, du fait des écarts de législations sociales entre les membres de l’UE.

Pour rééquilibrer le tout, une nouvelle directive « détachement des travailleurs » est actuellement en discussion. « Il s’agit d’élargir la notion de rémunération, en ajoutant au salaire minimum diverses sources de revenus, comme les primes par exemple », indique une source à la Commission européenne. Problème, onze pays membres s’opposent farouchement à cette réforme. Tous ont brandi leur « carton jaune », en estimant que la Commission européenne viole le principe de subsidiarité en s’impliquant dans ce dossier.

Si la réforme de fond sera compliquée à faire passer, une autre directive a tout de même pu être adoptée le 18 juin dernier, pour renforcer les contrôles. Le texte introduit la responsabilité du donneur d’ordre en cas de non-paiement des salaires, ce qui doit permettre au travailleur détaché d’être payé plus facilement. Mais l’Europe n’a ni les moyens, ni le droit d’assurer elle-même les contrôles. Cette responsabilité relève des seuls Etats membres. A ce petit jeu, l’intérêt national tend plutôt à prendre le dessus sur le communautaire.

L’hypothétique budget européen

Après le vote britannique, François Hollande a plaidé pour un approfondissement de l’intégration européenne. « J’ai proposé de reprendre l’idée de Jacques Delors du gouvernement de la zone euro et d’y ajouter un budget spécifique ainsi qu’un Parlement pour en assurer le contrôle démocratique », affirmait-il dans une tribune publiée dans Le Journal du dimanche. Pour y parvenir, il plaide pour une impulsion de Paris, Rome et Berlin. Les opinions divergent pourtant sensiblement entre Hollande et Merkel. La chancelière allemande se montre réticente face au discours vantant « plus d’Europe », alors que la défiance à l’égard des institutions est très forte sur le continent.

Le président Français en appelle à une réelle prise d’initiative ou au déclenchement rapide de l’article 50 pour voir sortir le Royaume-Uni. Pendant ce temps-là, Angela Merkel préfère miser sur la concertation des 27, c’est-à-dire jouer la montre… Vous avez dit désunion?

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Démission d’une élue: « Des collègues m’ont harcelée, à huis clos, sournoisement »

Fanny Audard est la deuxième adjointe du maire de Gaillan-en-Médoc, Jean-Brice Henry (LR), et conseillère communautaire. Le 20 mai dernier, elle a décidé de démissionner. La raison? Des « propos misogynes » et des « actes malveillants » au sein du conseil municipal. Elle raconte.

Je suis conseillère en économie sociale et familiale, les relations humaines sont mon outil de travail depuis plus de 15 ans. J’ai été élue en 2014, lors des dernières élections municipales. J’ai commencé à travailler quand la réforme des rythmes scolaires a été mise en place. A l’époque, tout s’est passé très vite. Il y avait un grand nombre de choses à mettre en place. Etant en charge de l’enfance et de la jeunesse, j’ai été beaucoup mise en avant.

Arrivée dans un conseil où la plupart des membres étaient en place depuis deux, trois voire quatre mandats, j’ai rejoint une équipe déjà bien en place. Je me suis investie pleinement dans mes fonctions, mais cette mise en avant a généré des crispations chez les adjoints. Après quelques temps, j’ai été prise à partie par certains.

Prise à partie par des adjoints

J’avais d’autant plus envie de travailler que le territoire, plutôt rural, qui souffre de précarité et auquel je suis très attachée, en a réellement besoin. Outre les clivages politiques, nous nous devons d’améliorer la situation et de proposer des choses nouvelles. A l’origine, je ne suis rattachée à aucun parti politique, mais j’ai décidé de suivre le maire, un homme en qui j’avais confiance. Je croyais en lui et au travail que l’on pouvait mettre en place avec le conseil municipal. Mais l’instauration de certains projets a engendré des inerties.

Un jour, des adjoints m’ont coincée dans un bureau et m’ont dit: « Il va falloir que ça change vite, très vite. Il va falloir que tu sois moins exposée. La presse te nomme première adjointe, tu n’es que la deuxième. Nous, on a mis plusieurs années pour en arriver là. » Moi, qui pensais que l’on travaillait dans le sens d’un intérêt public, j’ai été choquée de ce retour très agressif.

J’ai pris mes distances sur certains sujets, je me suis recentrée sur ma délégation. Je prenais moins la parole. Les actes malveillants et les propos misogynes se suivaient. A l’inverse, à la communauté de communes un travail de fond me permettait de m’épanouir en tant qu’élue. Cela m’a permis de me questionner sur la démocratie locale et la notion de pouvoir.

« Diviser pour mieux régner »

Ces violences à répétitions sont une forme de harcèlement: ça se passait à huis clos et de manière sournoise, il devient très difficile d’en tirer des preuves. Le conflit aurait pu apporter quelque chose si nous en avions tiré les bonnes leçons, mais il n’y avait pas de volonté de faire ensemble. C’était « diviser pour mieux régner », avec l’ambition du pouvoir et non de l’amélioration.

J’ai eu envie de démissionner plusieurs fois avant de donner ma lettre [de démission]. Mais j’étais décidée à résister de l’intérieur -mon grand-père faisait partie de la deuxième Division Blindée, la résistance est une histoire de famille. Pour le respect de mes électeurs, je voulais rester jusqu’au bout. Puis j’ai compris: résister, c’est aussi partir pour dénoncer, sans subir et sans valider leurs démarches. J’ai voulu rester fidèle à moi-même, à mes engagements et, du coup, aux autres. C’était la meilleure façon de le faire.

Fanny Audard, 39 ans, était la deuxième adjointe du maire de Gaillan-en-Médoc, Jean-Brice Henry, en charge de la vie scolaire et conseillère communautaire, responsable de la délégation petite-enfance, enfance et jeunesse.

Les députés votent un amendement pénalisant la contestation du génocide arménien

Il permettra de pénaliser la contestation ou la banalisation de l’ensemble des crimes contre l’humanité ou de guerre, dont le génocide arménien. Le coupable risque un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

C’était une des promesses du candidat François Hollande en 2012. Les députés ont adopté ce vendredi un amendement gouvernemental qui permettra de pénaliser la contestation ou la banalisation de l’ensemble des crimes contre l’humanité ou de guerre, dont le génocide arménien.

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Cet amendement, inscrit dans le projet de loi « Egalité et citoyenneté » pénalisera cette négation d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende. Aujourd’hui, seule la négociation de la Shoah est réprimée en France.

Une première censure par le Conseil constitutionnel en 2011

Cet amendement « permettra, au-delà et de manière plus générale, de prendre en compte des crimes historiquement reconnus, même si leur ancienneté exclut de fait toute possibilité pour la justice de se prononcer, lorsque leur contestation ou leur banalisation sera commise dans des conditions incitant à la haine ou à la violence », a précisé la secrétaire d’Etat à l’Egalité réelle Ericka Bareigts.

Au nom de la liberté d’expression, le Conseil constitutionnel avait censuré une loi votée en 2011 qui pénalisait un génocide « reconnu par la loi française », comme le génocide arménien. Cette fois-ci, le texte ne parle plus de génocide reconnu par la loi mais par une juridiction.