Laurence Rossignol parle de « nègres américains » puis avoue une « faute de langage »

Interrogée ce mercredi matin sur la mode islamique, la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes a risqué une comparaison entre esclavage et burqa. Dans son entourage, on réfute « toute volonté de choquer ».

La phrase n’est pas passée inaperçue. Interrogée sur la mode islamique sur RMC, la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, Laurence Rossignol a lâché qu’il y avait bien « des nègres américains qui étaient pour l’esclavage ». Elle répondait à une question de Jean-Jacques Bourdin qui l’interrogeait sur les femmes qui choisissent de porter le voile.

Cette comparaison a réveillé Twitter, où certains internautes estiment que la ministre a « raté la formation du gouvernement contre le racisme », en pleine campagne « Tous unis contre la haine ».

Dans l’entourage de Laurence Rossignol, contacté par L’Express, on réfute toute volonté de « provocation de la part de la ministre, ni volonté de choquer ».

« Référence pas évidente »

« Le mot nègre est un mot péjoratif, qui ne s’emploie plus que pour évoquer l’esclavage en référence à l’ouvrage de Montesquieu. C’est un mot que la ministre n’emploie en aucune autre circonstance. Elle a sous-estimé le fait que la référence n’était pas évidente », explique-t-on.

Lors de cet interview, la ministre a par ailleurs fustigé les marques vendant des vêtements islamiques estimant qu’elles étaient « irresponsables » et faisaient « d’un certain point de vue la promotion de l’enfermement du corps des femmes ».

La déchéance de nationalité, chapitre honteux du quinquennat Hollande

Par Christophe Barbier, publié le 30/03/2016 à 15:42

Triple fiasco pour François Hollande que ce dossier de la déchéance de nationalité. Il n’a jamais su en délimiter les contours, ce qui a rendu le texte illisible. Le Président n’a pas non plus su convaincre sa majorité et utiliser l’opinion publique, plutôt favorable à la mesure. Le résultat se solde par une grosse perte de temps pour la France.

Laurence Rossignol parle de « nègres américains », mais ne voulait « pas choquer »

Interrogée ce mercredi matin sur la mode islamique, la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes a risqué une comparaison entre esclavage et burqa. Dans son entourage, on réfute « toute volonté de choquer ».

La phrase n’est pas passée inaperçue. Interrogée sur la mode islamique sur RMC, la ministre des Familles, de l’Enfance et des Droits des femmes, Laurence Rossignol a lâché qu’il y avait bien « des nègres américains qui étaient pour l’esclavage ». Elle répondait à une question de Jean-Jacques Bourdin qui l’interrogeait sur les femmes qui choisissent de porter le voile.

Cette comparaison a réveillé Twitter, où certains internautes estiment que la ministre a « raté la formation du gouvernement contre le racisme », en pleine campagne « Tous unis contre la haine ».

Dans l’entourage de Laurence Rossignol, contacté par L’Express, on réfute toute volonté de « provocation de la part de la ministre, ni volonté de choquer ».

« Référence pas évidente »

« Le mot nègre est un mot péjoratif, qui ne s’emploie plus que pour évoquer l’esclavage en référence à l’ouvrage de Montesquieu. C’est un mot que la ministre n’emploie en aucune autre circonstance. Elle a sous-estimé le fait que la référence n’était pas évidente », explique-t-on.

Lors de cet interview, la ministre a par ailleurs fustigé les marques vendant des vêtements islamiques estimant qu’elles étaient « irresponsables » et faisaient « d’un certain point de vue la promotion de l’enfermement du corps des femmes ».

Déchéance de nationalité: Hollande renonce à la révision constitutionnelle

François Hollande s’est exprimé à l’issue du Conseil des ministres sur la réforme constitutionnelle. Il y renonce finalement, ainsi qu’à la convocation du Congrès de Versailles pour la valider. Pour « clore le débat constitutionnel ».

François Hollande renonce. Quatre mois après l’avoir annoncé à la suite des attentats de Paris et de Saint-Denis, le président de la République ne convoque finalement pas de Congrès à Versailles pour valider une révision de la Constitution. Il renonce à la réviser pour y inscrire le régime de l’état d’urgence et la déchéance de nationalité pour les terroristes. Il décide de « clore le débat constitutionnel » après avoir constaté que sa proposition, visant à « rassembler les Français », n’atteignait pas son objectif.

Il a annoncé ce renoncement à l’issue du Conseil des ministres sur la réforme constitutionnelle, ce mercredi midi, après avoir reçu les deux présidents de chambre, Claude Bartolone (PS), puis Gérard Larcher (LR). Et surtout après des mois de débat houleux et alors que la perspective d’un Congrès semblait dans l’impasse.

« Le terrorisme islamiste nous a déclaré la guerre. Cette guerre exige une réponse nationale », a plaidé François Hollande. Revenant sur sa proposition de révision constitutionnelle, il dit l’avoir « fait pour rassembler les Français. Je constate que l’Assemblée nationale et le Sénat ne sont pas parvenus à un accord. (…) Un compromis paraît même hors d’atteinte sur la définition de la déchéance de la nationalité pour les terroristes ». « Je ne dévirai pas de mes engagements », a-t-il assuré tout en annonçant sa décision de « clore le débat constitutionnel ».

Pas de « Congrès a minima »

L’article 1er, qui visait à inscrire le régime de l’état d’urgence dans la loi fondamentale, faisait l’objet d’un relatif consensus entre l’Assemblée et le Sénat, contrairement au controversé article 2 sur la déchéance de nationalité pour les terroristes. Assemblée nationale puis Sénat ont voté le projet de révision annoncé par François Hollande après les attentats du 13 novembre, mais chacun en réécrivant le volet sur la déchéance. Or les deux chambres doivent parvenir à une version identique avant toute réunion du Congrès, où le texte doit être approuvé à une majorité des 3/5e.

Or les chefs de file des sénateurs et députés LR refusaient une réforme cantonnée à l’état d’urgence… Pour le patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, « une demi-réforme ne fait pas une réforme ». « On ne va pas emmener le Parlement (au Congrès) pour la constitutionnalisation de l’état d’urgence, alors que l’état d’urgence fonctionne » sans, a affirmé Bruno Retailleau ce mardi après une réunion de son groupe. Son homologue à l’Assemblée, Christian Jacob, a lancé: « un Congrès a minima » ne « présente aucun intérêt » et « si le président de la République en est à vouloir un Congrès pour un Congrès », c’est « choquant ».

Juste après le vote du Sénat, le jour des attentats de Bruxelles, le chef de l’Etat avait reçu Gérard Larcher et Claude Bartolone, alors que droite et gauche ne cessaient de se renvoyer la responsabilité d’un possible échec. Un ping-pong qui devrait se poursuivre après ce renoncement ce l’Elysée.

Déchéance de nationalité enterrée: Cambadélis « s’excuse auprès des Français »

Après quatre mois de débats agités, François Hollande a enterré jeudi la révision constitutionnelle qu’il avait lui-même initiée après les attentats de novembre et qui s’est abîmée sur la déchéance de nationalité.

C’est la fin du débat sur la déchéance de nationalité. Après quatre mois de débats agités, François Hollande a enterré ce mercredi la révision constitutionnelle qu’il avait lui-même initiée après les attentats de novembre.

Dans la foulée, le premier secrétaire du PS Jean-Christophe Cambadélis a présenté les « excuses » de la majorité aux Français, pour n’avoir pas « convaincu la droite en générale et la droite sénatoriale en particulier » de voter le projet de révision constitutionnelle. Au-delà de ces excuses, la droite est bien pour Cambadélis la principale responsable du « triste spectacle » offert aux Français d’une « représentation parlementaire incapable de faire la paix, même pour combattre efficacement le terrorisme ».

Chez les Républicains, l’ancien Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, a évoqué un « camouflet » pour François Hollande. Pour Marine Le Pen, présidente du FN, le chef de l’Etat est « seul responsable » de cet « échec historique ».

A gauche, du côté des frondeurs, si on se réjouit de cette décision, les députés pointent également un « gâchis » et un « fiasco politique ».

2017: Hollande éliminé au 1er tour quel que soit le candidat de droite

Selon un sondage Ipsos publié ce mercredi, le chef de l’Etat, dont la cote de popularité ne cesse de diminuer, serait absent du second tour de l’élection présidentielle de 2017 quel que soit le candidat de droite face à lui.

C’est de dégringolade. François Hollande poursuit sa chute dans les sondages (-4 points face à Juppé et Sarkozy au 1er tour en 2017) et serait donc éliminé quel que soit le candidat de la droite, selon une enquête Ipsos-Sopra Steria publiée ce mercredi. Dans l’optique de la primaire à droite, Nicolas Sarkozy perd pour sa part 6 points par rapport à fin janvier, loin derrière Alain Juppé, ce qui illustre le rejet par les électeurs d’un nouveau duel Hollande-Sarkozy en 2017.

Dans l’hypothèse d’une candidature d’Alain Juppé à la présidentielle, le chef de l’Etat ne recueillerait que 14% (-4) d’intentions de vote, contre 31% pour le maire de Bordeaux (stable), 26% (+1) pour Marine Le Pen, 10% (+1,5%) pour Jean-Luc Mélenchon, et 8% (stable) pour François Bayrou, selon cette même enquête pour Le Monde réalisée en collaboration avec le Cevipof. En l’absence de candidature Bayrou, Alain Juppé est crédité de 36% et François Hollande de 15%.

Le Maire se mêle à la bataille

Si Nicolas Sarkozy était le candidat de la droite, François Hollande recueillerait 16% (-4) des voix, contre 27% (+1) à Marine Le Pen, 21% (stable) à Nicolas Sarkozy, 13% (stable) à François Bayrou, et 11% (+1) à Jean-Luc Mélenchon. Nicolas Dupont-Aignan est crédité de 5% à 6% d’intentions de vote, Cécile Duflot de 3%, Nathalie Arthaud et Philippe Poutou de 1,5%.

Avec 26% d’intentions de vote des personnes certaines de participer à la primaire à droite, Nicolas Sarkozy perd 6 points en deux mois sur Alain Juppé, toujours largement en tête malgré un léger recul, à 42% (-2). L’ancien chef de l’Etat conserve toutefois une légère avance auprès des proches des Républicains (LR), avec 39% d’intentions de vote, contre 35% à Alain Juppé.

Bruno Le Maire, qui a annoncé sa candidature fin février, progresse pour sa part de 6 points, avec 17% d’intentions de vote et vient se mêler à la bataille. Il creuse désormais l’écart avec François Fillon (8%, -1) et les autres candidats à la primaire, crédités de 1% à 2,5%.

Valls « le plus à même d’être au second tour »

A gauche, Martine Aubry (19%) et Emmanuel Macron (18%) sont considérées comme les personnalités qui incarnent le mieux la gauche, devant Jean-Luc Mélenchon (16%) et Manuel Valls (13%).

Mais c’est Manuel Valls (30%) qui est considéré comme la candidat de gauche « le plus à même de se qualifier au second tour de l’élection présidentielle », devant Emmanuel Macron (25%) et Martine Aubry (16%).

Enquête réalisée en ligne du 11 au 20 mars, auprès d’un échantillon de 20 319 personnes, dont 13 693 se disant certaines d’aller voter à la présidentielle de 2017 et 1282 certaines d’aller voter à la primaire.

La déchéance de nationalité est un chapitre mal négocié et honteux du quinquennat Hollande

Par Christophe Barbier, publié le 30/03/2016 à 15:42

Triple fiasco pour François Hollande que ce dossier de la déchéance de nationalité. Il n’a jamais su en délimiter les contours, ce qui a rendu le texte illisible. Le Président n’a pas non plus su convaincre sa majorité et utiliser l’opinion publique, plutôt favorable à la mesure. Le résultat se solde par une grosse perte de temps pour la France.

Des Molenbeek en France? Patrick Kanner trouve des soutiens à droite

Dimanche, le ministre de la Ville Patrick Kanner avait affirmé que certains quartiers français présentaient des « similitudes » avec Molenbeek. Des propos « lucides » saluent plusieurs responsables des Républicains, mais aussi le vice-président du Front national Florian Philippot.

Une nouvelle fois, un ministre du gouvernement de Manuel Valls trouve des soutiens à droite et des critiques à gauche. Cette fois, il s’agit de Patrick Kanner, le ministre de la Ville qui affirmait ce dimanche qu’une « centaine de quartiers en France » pouvait avoir des similitudes avec Molenbeek, commune bruxelloise frappée par la pauvreté et le communautarisme.

Des propos jugés lucides ce lundi par les Républicains Eric Ciotti et Hervé Mariton, ou par le frontiste Florian Philippot.

« Un diagnostic lucide »

« Je ne peux que me réjouir, quoiqu’elle soit tardive, de cette prise de conscience exprimée par un nouveau membre du gouvernement. La montée du communautarisme dans nos quartiers et les reculs continus de la laïcité font le lit de la radicalisation de la jeunesse et constituent un terreau favorable à la propagation des thèses salafistes », écrit ainsi dans un communiqué le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti, l’un des spécialistes des questions de sécurité chez les Républicains.

Hervé Mariton, candidat Les Républicains à la primaire de la droite en vue de 2017, va dans le même sens. Il a jugé ce lundi sur France Info que Patrick Kanner avait « le mérite d’un diagnostic lucide sur une situation réellement dangereuse ». « Il ne faut pas faire d’amalgame », mais « les quartiers sortis de tout contrôle existent », a ajouté le député de la Drôme.

Même constat au FN

Une constat qui a aussi convaincu des responsables de l’extrême droite, dont le vice-président du Front national, Florian Philippot qui a salué « la lucidité » de Patrick Kanner. « Pour une fois qu’on a un ministre, M. Kanner, qui enlève le voile d’aveuglement qu’il a devant les yeux et la bouche, qu’il dit une vérité un peu lucide, il faut au PS qu’on lui tombe dessus », a ajouté le conseiller régional d’Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne sur RMC.

Car au centre et à gauche, les propos du ministre ont été largement rejetés. Jean-Christophe Cambadélis, le premier secrétaire du parti socialiste, a affirmé dimanche sur France 5, ne pas être « pour ce discours » ni « ces formules sur les quartiers ». « Je ne suis pas pour la stigmatisation, je suis pour montrer ce qui réussit plutôt que de dire qu’il faut rejeter ».

LIRE AUSSI >> Des Molenbeek français? Le PS se déchire

Le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde est allée plus loin dans la critique, en se disant « très agacé » par les propos du ministre de la Ville, « parce que c’est le genre de formule qui débilise, qui mutile le débat politique français ».

Bienvenue au paradis.

Face à la multiplication des attentats-suicides, nous restons déconcertés. Quelle motivation suffisamment puissante peut conduire des personnes jeunes, ayant devant elles la vie, à se faire déchiqueter en tuant le maximum de « mécréants »? Le désespoir ne trouverait pas tant de candidats, l’acte de guerre non plus, le but premier d’un soldat n’étant pas de se faire tuer. Il faut donc chercher ailleurs et nous connaissons un tel « enfouissement du sacré », pour reprendre les termes de l’historien Alphonse Dupront (1905-1990), que l’explication religieuse nous échappe. Ne voir dans l’attentat-suicide qu’une expression particulière de la radicalité témoigne de beaucoup de myopie : aucun extrémisme laïc n’a jamais fait du suicide un mode d’action courant. Il y a en vérité derrière ceux que nous qualifions assez improprement de « kamikaze » une espérance éperdue : gagner le paradis par leur sacrifice ultime.

Et là surgit une autre question : de quel paradis s’agit-il? Depuis longtemps déjà, la description coranique du paradis a laissé perplexes les lecteurs occidentaux. Dans les années 1840, le grand politologue Alexis de Tocqueville fut de ceux-là et ses réflexions alimentèrent des « Notes sur le Coran et autres textes sur les religions » qui figurent dans ses œuvres complètes. Tocqueville utilisait une traduction du livre sacré due à Claude-Etienne Savary (1750-1788), dont il reproduisit le passage traitant des élus les plus aimés d’Allah, les « compagnons de la droite ».

« Ceux-là sont les Proches du Seigneur dans les jardins de la Félicité, – multitude parmi les Premiers, et petit nombre parmi les Derniers ! – sur des lits tressés s’accoudant et se faisant vis-à-vis. Parmi eux circuleront des éphèbes immortels, avec des cratères, des aiguières et des coupes d’un limpide breuvage dont ils ne seront ni entêtés, ni enivrés, avec des fruits qu’ils choisiront, avec de la chair d’oiseaux qu’ils convoiteront. Là seront des Houris aux grands yeux, semblables à la perle cachée, en récompense de ce qu’ils faisaient sur la terre. (….). Les Compagnons de la Droite seront, parmi des jujubiers sans épines et des acacias alignés, [dans] une ombre étendue, (….), [couchés sur] des tapis élevés [au-dessus du sol], [des Houris] que nous avons formées, en perfection, et que nous avons gardées vierges, coquettes, d’égale jeunesse, appartiendront aux Compagnons de la Droite ».

Commentant ce passage, Tocqueville s’étonne de l’absence complète de toute spiritualité et d’une vision très matérialiste du séjour céleste des bienheureux . Il n’était pas le premier à faire ce constat : deux siècles et demi plus tôt, Montaigne avait déjà écrit avec la truculence de la langue de son temps : « Quand Mahumet promet aux siens un paradis tapissé, paré d’or et de pierreries, peuplé de garces d’excellente beauté, de vins et de vivres singuliers : je veois bien que ce sont des mocqueurs qui se plient à nostre bestise, pour nous emmieller et attirer par ces opinions et espérances, convenables à nostre mortel appétit. » (Essais II.12)

Pourtant – trop de témoignages l’attestent -, c’est encore l’espoir d’accéder à ces triviales béatitudes qui motive les candidats à une prompte mort obtenue au service d’Allah. C’est aussi ce qui conduit les propagandistes de Daech à proclamer qu’ils préfèrent à la vie la mort puisque celle-ci rend licite ce qui était interdit sur Terre. Singulière (mais séduisante) image de l’au-delà, qui ressemble à un lieu douteux où l’on passe son temps à boire, festoyer et forniquer!

Ce qui nous paraît étrange, (pour ne pas dire opaque tant nous en sommes éloignés), est moins la naïveté de cette projection  des plaisirs terrestres dans le ciel que le fait qu’on puisse délibérément sacrifier sa vie réelle pour y participer. Certes, nos ancêtres ont, eux aussi, rêvé d’un bonheur éternel récompensant les justes. Si l’on en croit la monumentale « Histoire du paradis » publiée dans la décennie 90 par le grand historien Jean Delumeau, ainsi que les représentations artistiques du Moyen-âge et de la Renaissance, il était bien imaginé un jardin magnifique empli de chants et de musique, mais la béatitude y résidait (comme St Paul l’avait définie dans son « Epître aux Corinthiens ») dans une transfiguration induite par la vision face à face de la perfection divine, une sorte de fusion comme il convient à de purs esprits dégagés de la chair. Tant et si bien qu’il se trouva vite quelques persifleurs pour avancer que l’éternité devait finir par être bien ennuyeuse!

Il n’empêche qu’il y a quelque chose de consternant dans la crédulité djihadiste et qu’on retrouve toujours là le même constat : l’absurdité d’une lecture littéraliste des textes sacrés. Une approche symbolique interprétant la description paradisiaque comme une image poétique et réintroduisant un sens spirituel là où il n’est décrit qu’un reflet à peine idéalisé des jouissances terrestres rendrait sa dignité à une formulation que l’on dit révélée. Malheureusement, on n’entend guère ce discours chez les autorités religieuses de l’islam. La voie reste donc ouverte à la bêtise et à l’ignorance, ces autres noms de la dérive salafiste dont tant d’imams se font l’écho.

Et la fabrication des ceintures d’explosif continue… Les Houris éternellement vierges attendent.

Mobilisation générale !

Les nations européennes, engourdies dans une abondance inégale, myope et trompeuse, ne doivent pas se tromper de réaction face aux attaques terroristes dont elles sont maintenant les victimes.

Leurs dirigeants, cédant aux pulsions les plus sommaires, pourraient être tentés de se contenter d’une riposte purement sécuritaire. . Si nécessaire soit elle, celle-ci ne parviendrait pas seule à nous sortir du cauchemar dans lequel les attentats terroristes nous ont plongés.

Certes, aucun moyen ne doit être épargné pour assurer la sécurité des lieux publics et privés. Et la technologie en fournit chaque jour de plus efficaces, qu’il est urgent de mettre en œuvre.

Aucun moyen non plus ne doit être épargné pour pourchasser, arrêter et punir ceux qui se laissent entraîner dans de telles dérives.

A condition que ces moyens soient intelligents et tiennent compte du fait que nous sommes plus efficaces ensemble que séparément: les événements des derniers jours démontrent, si nécessaire, l’importance d’une cooperation européenne policière et judiciaire efficace et renforcée. En même temps que d’un contrôle commun de nos frontières.

Mais cette mobilisation générale ne suffira pas a . Car elle ne s’attaquera pas aux racines du mal: ce n’est pas en coupant quelques têtes de cette Gorgone qu’on en finira avec elle, car d’autres repousseront dans nos quartiers, nos villages, nos prisons, chez nos voisins, rameutant exclus et enragés, de toutes origines, pour donner un but, aussi insensé soit-il, à leurs existences désespérées .

Car c’est bien contre le désespoir qu’il faut se mobiliser. Et, pour cela, il faut le comprendre, sans évidemment l’admettre ni le tolérer pour autant. Pour y parvenir. cette mobilisation générale doit viser à donner du sens à toutes les vies. A offrir à chacun, autant qu’il est possible, les moyens de se réaliser dans ce monde, d’une façon à la fois pacifique et éthique. De donner un sens a la vie. Cela suppose bien des actions, en tout domaine. Et d’abord, comme toujours dans l’éducation.

Comment ne pas comprendre en effet, le désespoir de ceux qui arrivent à 20 ans sans diplôme ni compétence, sans emploi ni perspective, sans relation ni soutien autre que dans le monde de l’illégalité ? Pour beaucoup d’entre eux, tout s’est joué en maternelle: ceux qui y entrent en ne parlant que 300 mots de français n’ont pas la moindre chance de réussir des études qui, exigent d’en maîtriser, dès l’age de sept ans, au moins 1500. A ceux-là, il faut offrir un encadrement en maternelle bien plus serré que celui dont peuvent se contenter les enfants dont l’environnement familial peut y suppléer: 1 enseignant pour 3 enfants au lieu de 1 pour 20. Cela ne coûterait pas beaucoup plus, à plein régime, que l’inutile réforme récente des rythmes scolaires.

Bien sûr, cela ne suffira pas. Et on ne peut oublier que, par exemple, plusieurs des kamikaze qui ont précipité des avions sur les Twin Towers de New York et le Pentagone a Washington, le 11 septembre 2001, étaient des ingénieurs, formés dans les meilleures universités allemandes.

A ceux-là aussi, il aurait fallu fournir un avenir terrestre et laïc .

La mobilisation contre le désespoir doit donc être vraiment générale. Elle suppose de manifester, dans tous les recoins de notre société, de la fermeté, de la confiance, de l’empathie, du respect, de l’altruisme et du partage.

On en est loin.

j@attali.com